Le bardeau de l'Indre : un élément utile intégré dans le complexe réseau hydraulique du Val de Loire entre Villandry et Avoine.
Le bardeau de l'Indre est, en fait, la petite digue de l'Indre. Afin de comprendre le rôle de cette digue, il est important de la remettre dans son contexte. Nous allons donc visualiser le Val de Villandry à Rigny-Ussé.
Le Val de Loire moyen est composé entre Villandry et Avoine de quatre cours d'eau qui vont particulièrement nous intéresser.
Du nord au sud, nous avons le Val de Loire proprement dit qui coule d'est en ouest, puis le Cher qui s'écoule dans le même sens et qui se jette dans la Loire à Villandry. Nous trouvons au sud de la Loire, à partir de Villandry, l"ancien lit d'un bras du Cher dénommé Val du Vieux-Cher et qui confluait avec la Loire au lieu-dit Rupuanne à l'ouest de Bréhémont. Enfin plus au sud-ouest, la Val de l'Indre qui conflue avec la Loire au lieu-dit ke Néman à Avoine.
De la Loire à l'Indre, les niveaux sont différents et le niveau de l'Indre peut parfois être inférieur au niveau de la Loire, ce qui entraîne des incidences en terme d'écoulements des eaux qui peuvent apparître paradoxales aux néophytes.
Pour comprendre, nous allons reprendre les différents points importants de cette zone en partant du Bec du Cher à Villandry (1) :
- Le Cher se jette dans la Loire à Villandry (le Bec du Cher). Les deux rives à cet endroit ont été endiguées par l'homme. L'objectif était d'assécher le lit du bras du Cher, Vieux-Cher, entre Villandry et Bréhémont pour pouvoir exploiter cet espace. On a donc supprimé un des bras du Cher en construisant le barrage du Bec du Cher pour ne conserver que le bras qui joignait le Loire à Villandry en période de fortes eaux.
- Le barrage du Bec du Cher à Villandry reliant la levée de la Loire et la digue du Cher a été terminé en 1780. Son ossature est alors constituée de sapines (forte pièce de bois de sapin) et d'arbres. En 1783, et en 1789 de manière plus dramatique, des crues de la Loire et du Cher créent des brèches importantes dans le barrage. Il y gagnera à être reconstruit en pierre par la suite.
- Le barrage du Bec du Cher coupe alors le bras du Cher appelé Vieux-Cher ou rivière de Boudre, celui-ci est pourtant toujours un peu en eau par les sources issues du plateau de Druye et par les infiltrations issues de la remontée de nappes d'accompagnement de la Loire.
- La digue du Cher à cet endroit est composée d'une digue solide, d'une partie fusible et d'un déversoir muni d'une partie fusible. Le déversoir permet lors des crues moyennement fortes que le volume d'eau, issu de l'effet conjugué d'une crue ligérienne et d'une crue du Cher, se déverse dans le val par surverse au droit du déversoir dont le calage est inférieur au niveau des levées, puis rejoigne le lit du Vieux-Cher et se propage dans le val prévu à cet effet. Toute la partie qui suit le déversoir est endiguée des deux cotés jusqu'à le confluence avec le coteau en partie sud, la partie nord ayant été progressivement détruite au cours du 20ème siècle par ignorance du risque d'inondation, et volonté d'exploiter le maximum des terres alluviales.
- Les parties fusible vont être utiles lors de fortes crues, elles sont construites avec des matériaux moins solides que ceux utilisés pour les digues, et appuyées à Villandry sur une partie pavée de telle sorte que ce soit uniquement la partie fusible et non pas la totalité de la digue qui cède, le flux passera sur les pavés et se déversera dans le val.
- Tout le val entre le Vieux-Cher, la digue du Cher et la levée de la Loire, appelé aussi le Val de Bréhémont, est une zone inondable qui permet de soulager les cours d'eau en cas de crues, de réduire ainsi le risque de rupture de digue en aval sur le site dénommé Val d'Athion, de limiter les forces hydrauliques et ainsi de diminuer les risques de brèches sur la levée de la Loire et la digue du Cher. Ce val s'étend jusqu'à Huismes.
- Au niveau de Bréhémont, le val est composé de trois parties. La partie nord, dite du bourg, est située entre la levée de la Loire (rive sud du fleuve) et la digue du Vieux-Cher (sur sa rive droite) (1), la partie médiane située entre la rive gauche du Vieux-Cher et le Bardeau de l'Indre sur la rive droite de l'Indre (2). La partie sud du val, rive gauche de l'Indre, n'est pas endiguée et le val s'étend jusqu'au coteau illustré par la route reliant Rivarennes à Rigny-Ussé (3).
- L'eau accumulée dans le val doit pouvoir s'évacuer doucement et retourner vers l'Indre. C'est la raison pour laquelle s'est développé un réseau de Boires et Lanes, des fossés aménagés par l'homme et sur lesquels un système complexe de vannages permet le ressuyage des terres inondées (vidange progressive et contrôlée du val inondé).
- Le Vieux-Cher est en liaison avec l'Indre entre Bréhémont et Rivarennes, c'est le reste visible d'un delta marécageux ancien composé de l'Indre, du Cher et de la Loire dont subsiste l'Indre et ses nombreux bras, le Vieux-Cher et ses diverticules, la Boire Masson qui collecte les eaux issues du coteau de Lignières-de-Touraine et enfin la Loire.
- Dans le val, nous trouverons également des bardeaux ou digues dits "de travers". Ces digues "de travers" permettent de créer plusieurs bassins contigus, successifs, facilitant ainsi la gestion, tant de la crue que la décrue. Chaque bassin est muni d'un système de vannes à manivelle, électrifiées ou à clapet communément appelé des bondes.
- Le projet de barrage de Rupuanne, sur la rivière de Boudre ou Vieux-Cher, faisait partie d'un projet global des Turcies et Levées, et des paroisses aval en lien avec le barrage de Villandry en 1777.
- Le Barrage de Rupanne devait empêcher que le bras du Cher ne serve de déversoir à la Loire en cas de grandes crues (de la Loire vers le Cher) par le refoulement des eaux. Il ne sera pas réalisé tout de suite, et en octobre 1780, l'ingénieur des Turcies et Levées Bouchet s'oppose à la construction de ce barrage indiquant que le remède serait pireque le mal et que les inondations de l'Indre pourraient avoir des effets bien plus graves que le reflux de la Loire. Selon lui, en cas d'inondations et de débordements de l'Indre, les eaux submergeraient le val faute de cet exutoire naturel (barrage de Rupuanne) et cela serait encore pire en cas de rupture du Bec du Cher. A partir de de 1785, la crise implique des dépenses réduites au strict minimum. Malgré des demandes en 1790 et 1792 de la paroisse de Rigny, l'ingénieur Marie s'oppose toujours au barrage. En 1803, la population n'abandonnera pas cette idée et finalement construira elle-même sur ses propres deniers le barrage de Rupuanne.
- Actuellement, la fermeture du Vieux-Cher au lieu-dit Rupuanne ne permet pas l'évacuation des eaux vers la Loire. Un lane de jonction entre le Vieux-Cher et l'Indre a donc été réalisé. Une vanne commande son ouverture, le lane se déverse dans l'Indre dans le bras de Port Gautier. Ainsi le Vieux-Cher et toutes les eaux enfermées par l'ensemble des digues dans l'amont du Bardeau de travers sont amenées jusqu'ici et seront reconduites vers l'Indre par le lane.
- Une fois passé le Pont de Grenon à la liaison entre les territoires communaux de Bréhémont et de Rivarennes dans le sens amont-aval, le Bardeau de l'Indre se poursuit. Le val entre la levée de la Loire et le Bardeau de l'Indre est normalement protégé par le Bardeau de l'Indre, la levée de la Loire et le bardeau de travers (support de la route du Pont de Grenon à Rupuanne). Ce bassin aval dit Val de Rupuanne va servir à ressuyer le val en amont du bardeau de travers en cas d'inondations.
- Cepandant en cas de grande crue de l'Indre, un déversoir constitué d'une partie fusible se trouve entre Grenon et Rigny-Ussé permettant de déverser l'excès d'eau de l'Indre dans le val.
- Au niveau de Port Gautier, un autre déversoir est présent, il permet d'évacuer l'excès d'eau de l'Indre dans un val inondable complètement endigué. Dans ce val, un lane et un bras de l'Indre, le bras du Port Gautier, reconduisent l'eau jusque l'Indre. Une vanne permet de gérer l'eau présente dans le val. Le déversoir protège Rigny-Ussé des crues de l'Indre.
-Au début des années 1990, le Bardeau de l'Indre au lieu-dit la Pré Daveau à Rigny-Ussée a été déplacé de plus de 20 mètres de son emplacement initial pour limiter la pression des crues sur cette petite levée, et favoriser le champ d'expansion des crues faibles de l'Indre.
- Plus en aval, un bardeau de travers entre le lieu-dit l'Ile Saint-Martin et la levée nord de l'Indre à Rigny-Ussé permet de limiter le reflux de l'Indre lorsque le niveau de la Loire est trop élevé pour permettre le bon écoulement de l'Indre.
Sources :
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